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Nécrologies

La nouvelle est tombée aussi froide qu’une feuille d’automne : dans un décret publié courant novembre dans un journal de Plovdiv, la municipalité met fin à l’usage de l’une des plus curieuses coutumes Bulgares, je veux parler des nécrologies (1)

Nécrologies c’est le terme donné à ces feuilles – généralement au format papier machine – accolées ou agrafées aux arbres de Plovdiv, et qui annoncent, comme leurs noms l’indiquent le décès de tous quidams.
Dès mon premier voyage à Plovdiv en avril 2000, dès mes premiers pas dans cette ville je fus surpris par ces papiers collés, agrafés à chaque arbre..
L’esprit poétique de cette coutume m’a tout de suite charmé au plus haut point, d’autant qu’ils est interdit d’arracher ces nécrologies : Seul le vent, la pluie, sont autorisés à effacer ces traces de vies-mortes.
Hors du temps, hors de notre époque ou chaque geste doit être normalisé par trois feuilles administratives, cet affichage libre et sauvage, rappelait à chaque passant notre vanité durant notre passage sur terre : nous finirons en nécrologies, et seul les branches des arbres seront les bras de nos dernières tendresses avant de disparaître et que nos noms sous l’encre diluée par la pluie ne s’effacent du cœur de nos semblables. Tradition poétique – apparaître, paraître, pour disparaître, nous rappelait à chaque pas que tout ici est superficiel, et que, semblables aux feuilles mortes de la chanson de Prévert, l’automne de nos vies succédera toujours quoiqu’il advienne à nos plus beaux étés. Finir en papier collé, n’est ce pas là le rêve de tout collagiste ? Et cette pensée s’imposa à moi comme une évidence, finir ma vie de collagiste en nécrologie, soulevé par le vent, ma destinée enfin sublimée par les vers de Verlaine :
Et je m’en vais
Au vent mauvais
Quand sonne l’heure…

Quand sonne l’heure… mais la seule heure qui sonne annonce la mise à mort des nécrologies, cette tradition Bulgare, dont la fin est à mes yeux un acte d’européanisation de la Bulgarie, dans le mauvais sens du terme, l’abandon d’une tradition, l’abandon d’un espace de liberté et de poésie.
Puisqu’un décret me retire mon projet de mourir un jour à Plovdiv afin de finir en papier collé – et n'ayant à ce jour trouvé aucune raison valable de mourir ailleurs - je suis donc contraint à l’immortalité, Pierre Jean errant à jamais, au vent mauvais.

( 1) : Je ne sais, malgré mes demandes de renseignements auprès d’amis Bulgares, et auprès de Svéta, d’où provenait cette tradition, coutume religieuse ou populaire, existait- elle dans d’autres pays, et à quand remonte son origine ?

Pierre-Jean Varet

Lui écrire: ARTCOLLE@aol.com

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