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D'origine minérale (oxyde de cuivre, ocres divers, craies), toutes les teintes connues à l'époque sont présentes: le rouge, surtout, prédominant en tons multiples selon l'usage; le noir, le blanc et le jaune, puis les couleurs brune, rose, bleue, verte. La douceur des coloris pastels, la légèreté, la finesse des lignes et de la composition, en pleine harmonie avec l'architecture, nous portent - une fois encore par-delà les siècles - témoignage du bon goût artistique des anciens.
Avant de décrire les peintures, imprégnons-nous - avec Hérodote - de l'atmosphère qui présidait aux rites du trépas chez les Thraces: Dans le tombeau de Kazanlak, la première série de fresques est exécutée dans le corridor. Composée d'ornements inspirés par le règne animal, la frise inférieure se mélange avec des motifs architecturaux décoratifs. La frise supérieure, elle, est relative aux faits d'armes du défunt: les fantassins et cavaliers thraces y font face à des ennemis, reconnaissables à leurs armes - tels ce poignard incurvé d'un fantassin oriental ou ce bouclier oval d'un guerrier celte - ou à leur aspect physique - tels ces visages basanés des mercenaires d'Alexandre le Grand.
Mais ce sont surtout les fresques de la chambre mortuaire qui étonnent. Face à l'entrée, le mort - visage grave - et son épouse - figure pathétique posant une main délicate sur le bras bronzé et musclé; de son mari - sont représentés dans une scène de banquet funéraire. A la droite de l'homme, une femme portant un plateau chargé de grenades et de pommes est suivie d'un échanson offrant une coupe. Derrière, deux musiciennes jouent des trompettes du trépas (..."Toute ressemblance avec les trompettes du Jugement dernier serait purement fortuite!"). Sur la table basse, du pain coupé se mêle à d'autres mets et, tandis qu'à l'arrière de l'épouse deux servantes lui tendent l'une deux coffrets, l'autre une chlamyde bleu clair, un quadrige - aux chevaux énergiquement retenus par un jeune palefrenier - termine cette partie de la fresque. Bon! Maintenant que nous vous avons mis l'eau à la bouche, annonçons la mauvaise nouvelle (avant la bonne): pour la préservation de cette petite merveille, et afin d'y maintenir la température nécessaire à la conservation des fresques (15 à 18°, et une humidité de l'air ambiant de 65 à 70%), le tombeau n'est pas accessible au public. Pourtant, comme à Lascaux, une parfaite réplique - à 50 mètres de l'original - peut être visitée. Avant de terminer la visite de Kazanlak - si vous vous y trouvez le premier dimanche de juin - ne manquez pas le Festival de la Rose: commencé tôt le matin - dans les champs, près du Centre d'études expérimentales sur la culture et la distillation de la rose - par la cérémonie de la cueillette, suivie de chants et de danses folkloriques, il se continue par un cortège carnavalesque qui s'achemine vers la ville. Conduit par Baï Ganiou (personnage caricatural, représentant un commerçant parvenu, goujat et sans-gêne qui parcourt le monde afin de vendre son essence de rose!), le défilé se clôture par le char du roi et de la reine des roses... non sans avoir, au passage, aspergé les spectateurs d'une pluie d'eau de roses et en avoir ceint quelques-uns d'un collier parfumé, composé de ces fleurs. Histoire:
Si - dans la plus haute antiquité - le col de Chipka n'est qu'un chemin de cavaliers, la région de Kazanlak est cependant une place stratégique. En effet, la grande voie qui relie la plaine de Thrace et la mer Egée à la vallée du Danube (et, plus tard, Tarnovo à Constantinople) passe par le col voisin de Triavna. C'est là que s'établit la fameuse capitale du royaume thrace des Odryses: Seuthopolis (aujourd'hui sous les eaux du barrage - terminé en 1950 - sur la Toundja, à 7 km à l'ouest de l'emplacement de l'actuelle Kazanlak). Fondée - à la fin du IVème siècle avant notre ère - par le roi Seuthès III, elle atteint rapidement une population de 50.000 âmes.
A l'abri de murs épais de 2 mètres, garnis de tours et de bastions, ses maisons - spacieuses et pourvues de canalisations - sont composé;es de pièces qui rayonnent autour d'une cour intérieure. Son palais royal posède une façade de 40 mètres. Conquise par les Macédoniens, elle est rasée par les Celtes vers la fin du IIIème siècle avant notre ère. Ceux-ci établissent leur capitale - Thylis - à deux pas de là, peut-être à l'emplacement actuel de Toulovo.
Au Moyen-Age - à 6 km au nord de la ville actuelle - se dresse la forteresse de Krane... qui est détruite lors de l'avance des envahisseurs musulmans, après une âpre bataille - dans les environs des villages de Toulovo et Maglige - entre les troupes de Saradja Pacha et les troupes bulgares. Fondée peu après par l'occupant turc (du moins le pense-t-on car la première mention de la cité n'apparaît - sous la plume de Hadji Kalfa - qu'au XVIIème siècle!), Kazanlak hérite des fonctions de l'ancienne localité de Krane.
Au XIXème siècle, Konstantin Irétchèk - l'auteur de "Voyages à travers la Bulgarie" - nous la décrit comme "enfouie dans la verdure de ses noyers, au point que ses mosquées ne parviennent pas à dresser leurs minarets au-dessus des frondaisons". En 1871, c'est une ville de 20.000 habitants, comprenant 2.500 maisons bulgares, 1.500 maisons turques, 16 mosquées, 4 églises et un monastère. Kazanlak compte aujourd'hui 58.000 habitants mais la plupart des mosquées ont disparu, ainsi d'ailleurs que la plus grande partie du vieux quartier turc.
Mais où donc, dans l'histoire de la ville, se situe l'introduction de la fleur dont elle sera la capitale? Il semblerait que la rose ait été introduite vers le XVIIème siècle, venant d'Asie Mineure. Une vieille légende (d'autres diront: "Une histoire à l'eau de rose!") raconte qu'un jeune homme de la région fut, un jour, convié par le sultan d'Istanbul pour y construire un palais. Enchanté par la perfection du travail, le Turc lui offrit "ce qu'il désirait le plus!". Mais l'outrecuidant bulgare demanda la main de sa fille. Avant d'être chassé par le sultan, l'amoureux reçut, de la main de la belle, un plant de rose. Rentré au pays, en souvenir de sa tendre dulcinée, il le planta devant sa fenêtre... Le rosier fut heureux et eut beaucoup de petits plants.
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